Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Un peu d'histoires - Page 2

  • Imprimer

    LA BIODIVERSITE DE L'HIPPOCAMPE ROUGE

    Et dire que, malgré mes promenades régulières au bord de mer, je ne l'avais pas encore remarqué ! Et pourtant il campait, fier, à l'entrée du club de voile au port du Cros de Cagnes, sculpture originale réalisée par la plasticienne KIM BOULUKOS et les élèves du CE2B de l'école Giono.

    PA151427.JPG

    Légende locale véridique ou...  invention écologique... voici l'histoire de l'HIPPOCAMPE ROUGE du Cros de Cagnes.

    Bien de passionnantes légendes ont couru sur la côte qui longe le petit village de pêcheurs du Cros de Cagnes, au bord de la Méditerranée, à l’époque où les pointus commençaient à naviguer sur les flots… Mais la plus étonnante fût celle de l’hippocampe rouge.

    Dans ce coin de paradis, quand on se promène sur le port du Cros de Cagnes par beau temps, on croit que tout est calme. Les vagues bercent les poissons endormis sous un soleil lumineux. Tout n’est qu’harmonie, sérénité… Mais les apparences peuvent être trompeuses !

    PA151431.JPG

    Il était une fois le roi Ecaillus 1er qui avait des goûts très particuliers. Il ne voulait manger que du poisson. Aussi, les pêcheurs qui étaient au service de sa majesté goulue étaient obligés de lui ramener chaque jour quarante paniers bien remplis de poissons en tous genres : daurades, merlans, loups, sardines, sabres, rougets, baudroies, girelles…

    Rien n’échappait à son palais ! La mer Méditerranée se vidait chaque année de trente tonnes de poissons pour satisfaire l’énorme appétit de ce roi égoïste, affamé et cruel. Mais les choses changèrent…

    Un matin, le pêcheur Poiscaillus qui était parti de très bonne heure sur son petit pointu bleu et blanc avec l’espoir de ramener une belle pêche dut se rendre à l’évidence : « Par la grande queue du dauphin bleu ! pas un seul poisson dans mes nasses aujourd’hui ! ».

    Il revint bredouille dans le petit port où tous les pêcheurs l’attendaient les filets vides. Le roi allait être furieux !

    Ils décidèrent alors de changer leur façon de pêcher et demandèrent aux charpentiers de construire de plus gros bateaux, au maître cordier de fabriquer de plus grands filets tels des râteaux géants pour racler le fond des mers, et enfin abandonnèrent leurs petits pointus.

    Ils allaient même, par nuit de tempête, jeter les filets géants dans les courants les plus dangereux, face au petit clocher jaune qui devait veiller sur eux. Congres, murènes, thons, soles, rascasses, mendols, daurades royales, mulets, sublets. Nul poisson ne résistait à ses papilles de plus en plus exigeantes et insatisfaites.

    Mais voilà, un jour, le roi qui en avait assez de manger tous les poissons de la mer Méditerranée, ceux du fond, comme de surface et même la poutine, privilège local de cette petite baie, ordonna à ses serviteurs les pêcheurs de trouver d’autres saveurs marines. Quelque chose de différent pour changer son quotidien ! Les pêcheurs n’eurent plus comme choix que de se réunir dans leur petite église au clocher jaune pour prier et se résoudre à cette injustice. Comment allaient-ils nourrir leur famille ?

    PA151428.JPG

    Pendant ce temps là, à l’autre bout de la baie, un des leurs, le petit Rascassus ne se découragea pas ! Par une nuit sombre, il reprit son bon vieux pointu, et jeta ses filets. La chance sembla lui sourire car alors qu’il les remontait, il sentait quelque chose lui résister. Sous la lueur de la une, il fût alors ébloui par les reflets d’un rouge étincelant d’un étrange hippocampe qui se mit à parler : « Sais-tu Rascassus que j’ai passé mon enfance dans les eaux tranquilles du Cros de Cagnes et qu’aujourd’hui je suis le dernier hippocampe rouge de la mer Méditerranée ? Alors je t’en prie, redonne-moi ma liberté, en échange je réaliserai ton vœux le plus précieux».

    Rascassus souhaita de tout son cœur… que le roi change de régime alimentaire et qu’il devienne raisonnable dans sa façon de se nourrir afin de respecter la mer. Et depuis le jour où ce vœu se réalisa, devant le petit clocher du Cros, face à la mer rayonne le bel hippocampe rouge, message de biodiversité.

    Février 2011 : une jeune élève du CE2B de l'école Gambetta m'apprend que leur hippocampe rouge est maintenant bien au chaud dans la serre du Parc Phoenix à Nice.

    PA151432.JPG

    http://boulukos.free.fr/

    PA151429.JPG

  • Imprimer

    ZOLA DEFEND MANET

    Manet Dejeuner sur l'herbe.jpgA peine âgé d’une vingtaine d’années, Emile Zola prend la défense du peintre Edouard Manet dont les œuvres sont refusées à plusieurs reprises au Salon, principale instance de reconnaissance artistique. En 1863, l’une d’entre elles, Le Déjeuner sur l’herbe, est exposée lors d’une manifestation alternative : le Salon des Refusés. Elle y fait scandale. L’occasion pour Zola de prendre sa plume et de témoigner son admiration pour l’artiste…

    Le Déjeuner sur l'herbe est la plus grande toile d'Edouard Manet, celle où il a réalisé le rêve que font tous les peintres : mettre des figures de grandeur naturelle dans un paysage. On sait avec quelle puissance il a vaincu cette difficulté. Il y a là quelques feuillages, quelques troncs d'arbres, et, au fond, une rivière dans laquelle se baigne une femme en chemise ; sur le premier plan, deux jeunes gens sont assis en face d'une seconde femme qui vient de sortir de l'eau et qui sèche sa peau nue au grand air. 

    Cette femme nue a scandalisé le public, qui n'a vu qu'elle dans la toile. Bon Dieu ! Quelle indécence : une femme sans le moindre voile entre deux hommes habillés ! Cela ne s'était jamais vu. Et cette croyance était une grossière erreur, car il y a au musée du Louvre plus de cinquante tableaux dans lesquels se trouvent mêlés des personnages habillés et des personnages nus. Mais personne ne va chercher à se scandaliser au musée du Louvre. La foule s'est bien gardée d'ailleurs de juger Le Déjeuner sur l'herbe comme doit être jugée une véritable oeuvre d'art ; elle y a vu seulement des gens qui mangeaient sur l'herbe, au sortir du bain, et elle a cru que l'artiste avait mis une intention obscène et tapageuse dans la disposition du sujet, lorsque l'artiste avait simplement cherché à obtenir des oppositions vives et des masses franches.

    Les peintres, surtout Edouard Manet, qui est un peintre analyste, n'ont pas cette préoccupation du sujet qui tourmente la foule avant tout ; le sujet pour eux est un prétexte à peindre tandis que pour la foule le sujet seul existe. Ainsi, assurément, la femme nue du Déjeuner sur l'herbe n'est là que pour fournir à l'artiste l'occasion de peindre un peu de chair.

    Ce qu'il faut voir dans le tableau, ce n'est pas un déjeuner sur l'herbe, c'est le paysage entier, avec ses vigueurs et ses finesses, avec ses premiers plans si larges, si solides, et ses fonds d'une délicatesse si légère ; c'est cette chair ferme modelée à grands pans de lumière, ces étoffes souples et fortes, et surtout cette délicieuse silhouette de femme en chemise qui fait dans le fond, une adorable tache blanche au milieu des feuilles vertes, c'est enfin cet ensemble vaste, plein d'air, ce coin de la nature rendu avec une simplicité si juste, toute cette page admirable dans laquelle un artiste a mis tous les éléments particuliers et rares qui étaient en lui.

    Extrait de « Pour Manet » par Emile ZOLA