Faire découvrir l'art du Graff, par une balade dans Cagnes sur mer, à la rencontre de jeunes artistes, c’était le pari réussi de l’Office de tourisme dans le cadre des journées du Patrimoine, le 20 septembre dernier. L’originalité du sujet a attiré non seulement des cagnois curieux mais également des personnes venues de tout le département, et surtout toutes générations confondues...
Pour avoir personnellement participé à des ateliers d’initiation au graff en 2005 et 2006 dans le cadre d’une association cagnoise dont je faisais partie, j’étais curieuse de voir comment avaient évolué les mentalités. A l’époque, des fresques sur panneaux de bois avaient été réalisées par des jeunes de plusieurs quartiers de Cagnes grâce à ces ateliers itinérants mis en place par des bénévoles et des artistes. Les murs d’expression graphique libre venaient d’être créés par la municipalité et l’association avait fait le lien entre les graffeurs et la Ville de Cagnes pour permettre une exposition des photos de leurs créations sur ces murs. Pratiquement tous ces jeunes étaient réfractaires à l’idée d’être connus des services municipaux, voire de tout ce qui pouvait représenter l’Autorité... Combien de fois, à l’époque, on m’a demandé de ne pas photographier de face... plutôt de trois-quart avec la casquette ou la cagoule sur la tête…
Alors en 2009 où en est l’esprit de l’Urban Art ? D’abord, tout le long de la promenade, du pont sous l’autoroute jusqu’aux bords de la Cagne derrière le lycée Escoffier pour finir sur la place De Gaulle, Jean-Marc nous a expliqué l’histoire de cet art de la rue, pourquoi les murs, les trains, les débuts en 1942, les noms de certains graffeurs qui ont marqué leur génération… Instructif, un art qui rentre petit à petit dans le Patrimoine. En même temps, les promeneurs admiraient les dessins très figuratifs ou complétement "abstraits". Tous ceux qui se sont essayés un jour à manipuler les bombes pourront vous dire que « c’est pas évident ! » de maîtriser le jet, de changer de caps quand il faut, d’éviter les coulures ou au contraire faire couler là où l’on veut… Le niveau des graffeurs va de l’autodidacte plus ou moins doué à l’étudiant, voire le diplômé, en arts plastiques niveau « Beaux Arts ». Toujours d’expérience personnelle, j’ai vu certains se servir de la bombe comme un peintre tient un pinceau et créer directement sur la toile, et d’autres faire du pochoir avec des caches... Chacun, ses capacités.
Ce dimanche là, les deux jeunes, qui ont réalisé leur « performance » devant le public, étaient « bons » et surtout passionnés. L’évolution de ces dernières années est sans doute là. Certains affirment leur passion au grand jour, respectent les lieux autorisés, décrivent volontiers et en détail leur technique, acceptent d’être photographié sans aucun souci. Les participants à cette promenade-conférence ont ainsi fait connaissance avec un jeune agent immobilier qui passe ses week end entiers à graffer et, déformation professionnelle sans doute, a été tellement volubile dans ses explications sur son parcours et sa passion qu’il en a eu du mal à terminer sa démonstration, pris qu’il était sous le feu des questions du public. Tout y est passé : le vocabulaire spécifique « taper une lettre.. » la différence entre tag « signature » et graff « dessin ».., le style de chacun... A voir : 2CU Crew, signature que l’on retrouve souvent sur les murs d’expression graphique libre de Cagnes et représentant le collectif dont font partie NEAS et SKUZ, les artistes du jour.
Loin des remarques de quelques grincheux (très rares) qui ont relevé quelques coups de bombe sur les arbres ou noté que « tout de même, vos dessins sont tristes » (chacun ses goûts, madame), tous les participants ont, de leur avis même, partagé un moment très sympathique, riche de contacts intéressants permettant à tous… d’ouvrir les yeux...